Mis à jour le 10 octobre 2021
Ne vous est-il jamais arrivé de rester coite devant les questions innocentes de vos progénitures ? Indubitablement, leurs questions ingénues nous ramènent à notre curiosité perdue. Et pourquoi ne pas y remédier en leur apportant des réponses tout en cultivant notre propre curiosité ?
Alors, « Quelle est l’utilité des moustiques ? »
Telle est la question d’enfant à élucider.
En voici la réponse…
Sacrés moustiques ! Peut-on imaginer qu’un insecte dont la taille varie selon les genres et les espèces de 3 à 40 mm puisse susciter autant d’aversion !
Certes, tous les moustiques n’ont pas besoin de sang pour se procurer les protéines nécessaires à la ponte de leurs œufs. En effet, sur les 3500 espèces répertoriées, seulement 6% – des femelles uniquement – ont un régime hématophage. Ce sont donc les femelles de certaines espèces qui utilisent leur trompe (ou rostre) pour nous infliger leur piqure tant redoutée.
Spontanément et avec un regard anthropocentré, l’éradication des moustiques apparaît comme une évidence. Sauf que tout n’est pas aussi simple et que la communauté scientifique elle-même est partagée.
Éradiquer les moustiques sauverait des vies
Tel est l’argument avancé par les partisans du faible intérêt des moustiques. Si l’on pense aux maladies telles que le chikungunya, la dengue, le virus Zika, la fièvre du Nil occidental (West Nile virus), la fièvre jaune et le paludisme, éradiquer les moustiques sauverait des millions de vies.
Si l’on s’attarde au seul cas du paludisme (également appelé « malaria »), l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comptabilise 229 millions de personnes touchées par cette maladie dans 87 pays et 409 000 décès en 2019 (voir le World malaria report de 2020). Et toujours selon ce même rapport, 1,5 milliard cas de paludisme et 7,6 millions de décès liés au paludisme ont été évités depuis 2000 notamment grâce aux différents programmes de prévention et de recherche sur cette maladie.
Le paludisme a un coût humain et aussi financier. Cette maladie a un impact réel sur la croissance économique des pays touchés par la malaria. En effet, en éradiquant les maladies transmises par les moustiques, il y aurait moins de charges pesant sur les systèmes de santé et les hôpitaux. De plus, d’autres problèmes prioritaires de santé pourraient bénéficier d’investissements.
Toutefois, l’éradication totale des moustiques relève à ce stade de la gageure.
On connait déjà les conséquences environnementales désastreuses du D.D.T découvert par Paul Hermann Müller, lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine en 1948.
D’autres techniques sont employées et se veulent plus ciblées. Les résultats sont certes encourageants mais loin du 100%. Ainsi, au Brésil, des dizaines de milliers de moustiques tigres stériles ont été introduits afin de rendre les œufs non-viables. 50% des œufs ont été rendus stériles au bout de trois lâchers selon les résultats de l’étude « Field performance of sterile male mosquitoes released from an uncrewed aerial vehicle » publiée dans la revue Science and Robotics en juin 2020.
Mais la lutte contre le paludisme pourrait connaître un tournant majeur grâce à la recommandation de l’OMS de déployer à grande échelle le vaccin Mosquirix de la firme GlaxoSmithKline (GSK). Ce mercredi 6 octobre constitue ainsi selon le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, un « moment historique » ainsi qu’« une avancée décisive pour la science, la santé infantile et le contrôle de la maladie ». Néanmoins, l’efficacité de ce vaccin est loin d’être optimale. L’injection du vaccin devra donc être combinée aux autres mesures de protection (moustiquaires, insecticides, …) comme le rappelle l’étude du Dr Brian M Greenwood publiée dans la revue The Lancet. Le Mosquirix n’est que la première pierre à l’édifice de la lutte contre le paludisme. De nouveaux vaccins plus performants seront certainement amenés à voir le jour dans les années à venir. Ainsi, la firme allemande BioNTech – l’un des laboratoires ayant découvert le vaccin contre la COVID-19 – a déclaré faire des recherches sur un vaccin à ARN messager contre le paludisme au mois de juillet.
Les moustiques sont un maillon important de notre écosystème
D’autres s’attellent à dire que les moustiques sont essentiels à la biodiversité et participent de ce fait à la survie de notre écosystème.
En premier lieu, ils sont un maillon important dans la chaîne alimentaire. En effet, les larves assurent la filtration de l’eau et favorisent la prolifération végétale en décomposant l’azote organique en azote minéral. Les larves sont également gobées par des invertébrés aquatiques, des batraciens et des poissons.
Une fois adultes, les moustiques constituent un met succulent et facile à attraper pour les oiseaux, chauve-souris, grenouilles, araignées, lézards ou libellules.
D’ailleurs, en toundra arctique, leur éradication pourrait avoir des conséquences désastreuses pour les oiseaux migrateurs. Certaines espèces de ces oiseaux se nourrissent exclusivement de moustiques. Certains entomologistes prédisent d’ailleurs une disparition de la moitié des oiseaux dans cette région si les moustiques venaient à disparaître.
De plus, les moustiques participent à la pollinisation des plantes et favorisent leur fécondation. Les moustiques mâles ont un rôle prépondérant de pollinisateurs mais les femelles ne sont pas en reste car elles butinent lorsqu’elles ne trouvent pas le sang nécessaire à la production des œufs. Ce rôle de pollinisateur est peu connu par rapport à celui des papillons ou des abeilles. Il est néanmoins crucial dans la pollinisation du cacaoyer. Mais qu’est-ce qui motivent les moustiques à polliniser les végétaux ? Le sucre présent dans le nectar des fleurs ! C’est en effet le « carburant » qui leur permet de couvrir leur besoins énergétiques.
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Quelle ironie de voir la facilité avec laquelle l’existence de certaines espèces est menacée du fait de nos activités et… l’utopie d’une éradication totale d’un insecte pesant en moyenne 2.5 mg !
Et si cet insecte était un agent naturel de la régulation des populations en favorisant la sélection naturelle ? Au même titre d’ailleurs que certains virus comme la Covid-19. Certes, les progrès de la médecine sont là (bionudge, laboratoire de biologie médicale in vivo, …). Toutefois, si l’on prend le cas de la Covid-19, même avec le vaccin, les gestes barrières restent encore d’actualité. Preuve s’il en est de notre fragilité face à la nature aussi minuscule soit elle.
Et si vous souhaitez expliquer le rôle des moustiques de façon ludique à vos enfants, vous pouvez consulter la vidéo « À quoi servent les moustiques ? » de l’émission 1 jour, 1 question disponible sur le site éducatif Lumni.
Crédit Photo
Image de Егор Камелев provenant de Pixabay