Ne vous est-il jamais arrivé de rester coite devant les questions innocentes de vos progénitures ? Indubitablement, leurs questions ingénues nous ramènent à notre curiosité perdue. Et pourquoi ne pas y remédier en leur apportant des réponses tout en cultivant notre propre curiosité ?
Alors, « D’où vient le nom de la mer Morte ? »
Telle est la question d’enfant à élucider.
En voici la réponse…
Située entre la Jordanie à l’est, la Cisjordanie au nord et Israël à l’ouest, la mer Morte n’est pas à proprement parler une mer mais plutôt un lac salé. D’une surface de 810 km2 environ, elle mesure 67 km de long et 18 km de large. Avec une altitude de 430 m environ en dessous du niveau de la mer, la mer Morte constitue le point le plus bas de la surface de la Terre. La mer Morte est en réalité composée d’un lac important au nord qui représente près des trois quarts de sa superficie totale et d’une lagune plus petite au sud. Sa partie nord atteint jusqu’à 400 mètres de profondeur tandis que la partie sud est peu profonde (3 mètres en moyenne de profondeur). Ces deux bassins sont séparés par la péninsule de Lisan au sud-est.
La mer Morte, un écosystème unique
Le nom de la mer Morte date de l’Antiquité puisque ce sont les Grecs qui l’ont baptisée ainsi. La raison ? Une concentration de sels tellement importante que les poissons et les algues macroscopiques ne peuvent subsister. En effet, l’eau de la mer Morte contient 27,5 % de sels, contre 2 à 4 % pour les eaux de mers. Néanmoins, n’allez pas croire qu’aucune forme de vie n’existe. Malgré ces conditions de vie extrême, des bactéries et archées ainsi que des microchampignons vivent dans les eaux et dans les sédiments de la mer Morte.
De plus, l’eau de la mer Morte est composée d’une quantité considérable d’oligo-éléments, de sels et de minéraux : calcium, potassium, magnésium, sulfates, brome, chlorures de magnésium et de sodium, … L’eau de la mer Morte est dix fois plus riche en substances minérales que celle des autres mers. Cette forte concentration rend l’eau de la mer Morte – et plus précisément ses sels et ses boues – très bénéfiques pour revitaliser l’organisme et notamment la peau. On raconte même que Cléopâtre faisait des bains de boue de la mer Morte pour protéger sa peau.
Sa forte concentration en sodium (sel) permet ainsi au corps de flotter à la surface de l’eau sans aucun effort… comme en apesanteur. Mais pourquoi retrouve-t-on une telle profusion de sel ? Chaque année, le Jourdain qui se jette dans la mer Morte apporterait près de 850 000 tonnes de sels. Ces sels, transportés dans les eaux du Jourdain, sont issus de l’érosion de la croûte terrestre. Or, la mer Morte ne possédant pas d’affluent, le sel ne peut pas s’écouler et stagne. Si l’on y ajoute l’évaporation naturelle de l’eau due notamment aux températures élevées l’été (40° en moyenne), on comprend mieux d’où vient son extrême salinité. Néanmoins, contrairement aux idées reçues, la mer Morte n’est pas le plan d’eau le plus salé du monde avec son taux de salinité de 27,5% (contre autour de 3,5% dans l’océan mondial). En effet, les lacs Don Juan (à environ 41%), Kara-Bogaz-Gol, Assal (à 35% de salinité environ) et Vanda (à 33% environ) sont beaucoup plus salés.
La disparition programmée de la mer Morte
Avec une perte de 28% de sa profondeur et du tiers de sa superficie au cours de ces cinquante dernières années, avec un niveau de l’eau qui descend de 1,45 mètre en moyenne chaque année, c’est indéniable : la mer Morte se meurt.
En cause ? La construction de deux infrastructures israélienne et jordanienne qui surexploitent la ressource en eau du Jourdain. Il faut comprendre que pendant des millénaires, la mer Morte se remplissait d’eau douce par le fleuve Jourdain via le lac Tibériade. Or, en 1960, Israël décide de « verdir le désert » du Néguev en créant une gigantesque voie d’eau. Pour se faire, un barrage a été édifié au sud du lac Tibériade.
À la même période, la Jordanie construit un canal qui a pour objectif de puiser l’eau d’un affluent du Jourdain afin d’exploiter les sels de la mer Morte. Des canaux de dérivation pour irriguer les cultures seront par la suite érigés.
La conséquence est que le Jourdain est passé d’un débit de 1 300 m3 /s dans les années soixante à 300 m3 /s au début des années 2000.
Ces infrastructures accélèrent également l’évaporation de l’eau et ce, sans compter sur les effets du réchauffement climatique.
De plus, des entreprises israéliennes et jordaniennes exploitent les eaux de la Mer Morte pour extraire notamment la potasse, le brome et le magnésium dans d’énormes bassins d’évaporation. Ces minéraux sont utilisés dans le monde entier pour les engrais, les cosmétiques ou les ordinateurs. Les usines ne remplacent qu’environ la moitié de l’eau qu’elles extraient.
L’assèchement inéluctable de la mer Morte a pour conséquence la création de dolines, effondrement du sol se matérialisant sous la forme de dépressions circulaires à fond plat. Les dolines constituent un véritable danger pour la population car elles semblent s’effondrer presque au hasard. Certains endroits de la mer Morte sont devenus de ce fait des zones sinistrées.
Face au déclin de la mer Morte, différents plans de sauvetage ont été pensés. Le dernier en date prévoyait de « construire une canalisation depuis la mer Rouge ainsi qu’une usine de dessalement afin de perfuser l’étendue d’eau en partie asséchée ». Cet accord tripartite entre la Jordanie, l’Autorité Palestinienne et Israël datant de 2013 et communément appelé Canal de la paix n’a pu voir le jour puisqu’en 2021 la Jordanie décide de se retirer du projet.
En conclusion, si rien n’est fait, les scientifiques prévoient la disparition de la mer Morte en 2050.
Pour les petits curieux
La mer Morte expliquée aux enfants… et aux plus grands
À voir et à revoir l’émission C’est pas sorcier -La Mer morte…morte de soif pour découvrir notamment comment la mer Morte s’est formée ou encore avoir une explication scientifique sur la création des dolines.
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« Dead Sea Salts » de TheBoth est sous licence CC BY 2.0.